L'origine
de la polyphonie corse demeure un mystère. Pour ceux qui
la portent, elle constitue une sorte de voyage des voix
et des âmes entremêlées, mais aussi le détour des hommes
par la poésie ; un chant minéral à l'image d'une terre rude
mais généreuse.
Ce chant de tradition orale a franchi les siècles en se
nourrissant d'influences diverses (chant sémitique, grégorien...).
D'une architecture relativement complexe, il met invariablement
en présence 3 voix distinctes (sicanda, bassu et terza)
qui jouissent d'une grande liberté d'expression (ribuccate).
La Paghjella (polyphonie profane la plus populaire) connaît
depuis 25 ans environ un véritable renouveau. Serait-elle
en train de se forger une nouvelle fonction sociale ? Elle
est en effet pratiquée à nouveau par les jeunes générations
en dépit d'un déclin certain des communautés paysannes dont
elle fut, sans aucun doute, l'un des fondements !
Par la sauvegarde du patrimoine oral, par la création qui
se veut le fruit nouveau d'un vieil arbre profondément enraciné,
ce chant semble assurer aujourd'hui sa pérennité. Il est
de nouveau le reflet d'un peuple qui hésite, s'interroge,
mais espère et vit. Au sommet de l'art polyphonique : Aujourd'hui
tout le monde connaît les polyphonies corses...
A Filetta
Cette reconnaissance n'aurait pu avoir lieu sans des pionniers
comme A Filetta. Né en Balagne en 1978, de la passion du
chant et de la terre, le groupe ancre ses racines au plus
profond de son sol d'origine comme la fougère dont il tire
son nom.
Exclusivement vocal, leur répertoire illustre l'itinéraire
artistique du groupe; chants sacrés et profanes hérités
de la tradition et chante de création se mêlent, témoins
d'une culture en mouvement et non pas figée dans le passé.
Ils savent faire vivre et partager cet art vocal et difficile
mais ô combien magnifique dont ils ont le secret.
Des voix inattendues, inouïes. Des regards complices et
puissants d'amour pour leur île et pour leur public.
Au cinéma et au théâtre : Pour beaucoup, le choc voire la
révélation, fut la bande originale du film de Jacques Weber
"Don Juan" composée pour le groupe avec une confondante
intelligence par Bruno Coulais, première étape d'une fructueuse
collaboration.
Depuis ils ont enregistré la bande originale du film de
Eric Valli "Himalaya"", César 2000 pour la meilleure musique
de film et CD d'or, et participé au nouvel album d'Akhénaton
pour le film "Comme un aimant".
Puis ils ont osé le véritable engagement au théâtre avec
"Médée" la tragédie de Sénèque où les chanteurs d'A Filetta
figuraient dans le chœur antique.
Composition du groupe Jean-Claude Acquaviva, Jean Antonelli,
José Filippi, Jean-Luc Geronimi, Paul Giansily, Jean Sicurani,
Maxime Vuillamier. |