Des yeux
bleu clair comme la mer des rivages insulaires. La poignée
de main solide et franche. Et la voix, douce, qui semble
caresser I'accent natal . A 65 ans, Edmond Simeoni n'a rien
d'un " chef terroriste ", comme d'aucuns pourraient le caricaturer,
depuis les tristes événements d'Aléria en 1975. Pour lui
aussi , ce souvenir , le procès et l'incarcération qui ont
suivi, torturent encore sa mémoire.
"Mais l'homme semble aujourd'hui
se poser davantage en pasteur qu'en martyr de l'autonomisme
corse. En 1975, j'étais au centre de l'affaire, mais je
n'ai jamais basculé dans la violence clandestine, je n'ai
jamais mis de cagoule ni porté une arme à la main ".
Son credo? Humanisme et démocratie,
en faveur d'un respect identitaire corse. L'Etat français…
et les Corses dos à dos
" Je suis d'abord médecin,
humaniste et démocrate, ce sont les choix fondateurs de
toute ma vie. Le démocratie doit être au centre de la construction
corse, avec une véritable solidarité sociale et un souci
de l'environnement, sinon c'est une voie sans issue, estime
ce fondateur historique de l'ARC (Action Régionaliste Corse).
Je suis un homme très engagé, militant depuis quarante ans,
mais je me bats pour un patrimoine, culturel ou environnemental,
commun à tous. Je suis adepte d'une communauté humaine,
avec toute sa diversité et sa richesse ".
A ce titre, Edmond Simeoni
n'épargne aucune des parties qui ont fait l'histoire récente
de l'île. D'abord l'Etat français "très unitaire, marqué
par cette difficulté à devenir pluriel, qui n'a jamais créé
en Corse les conditions de base de la démocratie, où la
vie publique est polluée par le clientélisme ".
Ensuite " le système politique
local dans son ensemble, complice, qui a aliéné le suffrage
universel ", et " les Corses eux-mêmes, qui se sont engouffrés
dans cette zone de non droit ou dans la violence ".
A ses yeux, le dialogue amorcé
par Matignon semble aller dans le ' bon sens. Lui milite
désormais pour la constitution d'une " troisième voie politique
" en Corse, dans le sillon de " Rinnovu " et " Leva", qui
se démarque du front conservateur comme des extrémismes,
pour fonder une Corse nouvelle.
La Corse une région euro-méditérranéenne
?
Une région française, certes,
mais surtout euro-méditerranéenne. L'autonomie plutôt que
l'autarcie; l'ouverture plutôt que la frontière. Dans la
paix et le respect de chacun.
" Je me méfie des nationalistes,
souvent foyers d'intolérance, mais la dignité des Corses
est une revendication essentielle. La reconnaissance du
peuple corse pose certes des problèmes constitutionnels,
mais il y a moyen de reconnaître une identité de facto.
Les querelles de termes ne doivent pas masquer l'essentiel.
Je suis un homme de compromis ".
Alexandre Carini |