Mise en ordre juridique du territoire en matière immobilière, transmission du patrimoine entre vifs et par décès, propositions juridiques et fiscales

Conclusion
Par Maître Alain Spadoni
Président de l'Association Miot

L'aspect juridique

Depuis qu'ont été mises en application les recommandations de la "commission Badinter" (1989) :

• Les Notaires de Corse ont créé 1500 titres de propriété ;
• Ils ont ainsi réglé 3 200 à 3 500 successions.

Cela représente 30 à 35 % environ de ce qui doit être réglé.

  1. - Analyse du résultat

La méthode de création de titres selon la méthode préconisée par la Commission Badinter donne satisfaction :

• La méthode répond à ce que l'on en attendait ;
• Les titres sont créés et publiés à la conservation des hypothèques ;
• La revendication des tiers est provoquée par :

  • La publication dans le journal local (journal de grande diffusion) ;
  • L'affichage en Mairie.

Il existe un petit contentieux (ce qui était souhaitable car cela indique que l'information de la création du titre est bien passée. Ce contentieux est d'environ 1% sur les titres créés.

2. - Les difficultés

Dans l'établissement des dévolutions successorales, plus les années passent et plus les " anciens " disparaissent. Il devient donc difficile et risqué d'établir des actes de Notoriété dévolutive et prescriptive.

En ce qui concerne les Notoriétés Dévolutives, le recours au généalogiste pour vérifier va devenir de plus en plus indispensablemais cela va augmenter le coût des règlements successoraux.
En ce qui concerne les Notoriétés prescriptives constituant titre de propriété

• Le géomètre devra être de plus en plus consulté et son intervention va devenir nécessaire pour vérifier la réalité entre le cadastre et le terrain.
• Des instructions devront être données aux conservations des hypothèques pour faire délivrer dans le délai de l mois les Etats avant 1956 (actuellement 5 à 6 mois.)
• Des instructions devront être données au cadastre pour délivrer dans un délai rapide :

- les plans ;
- les tables de correspondances ;
- les historiques de l'évolution (Mutation de noms).

En ce qui concerne les actes de partage

• II faut souligner les nombreux cas où les héritiers ne sont plus localisables.

Pour éviter le blocage, le Tribunal peut désigner un représentant.
Cette procédure devrait être simplifiée et la décision du Juge doit pouvoir être rapide.

• La difficulté des règlements successoraux rend le recours à Justice très difficile, souvent peu efficace mais dans tous les cas très coûteux. Il serait souhaitable que, lorsqu'une assignation est lancée pour parvenir à un partage, le Juge de la mise en état exige que lui soient produits un acte de Notoriété et le justificatif du titre de propriété des biens à partager.

Cette manière de procéder facilitera le travail de l'expert, du Juge et du Notaire. Cette proposition n'est pas incompatible avec la proposition de déléguer au Notaire une partie du travail du Juge (procédure d'Alsace-Lorraine.)

L'aspect fiscal

• L'article II-IV de la loi de Finances pour 1986, modifié par la loi du 21 décembre 1994 et repris dans le statut fiscal de la Corse : ces mesures prévoient l'exonération de droit de timbre et de droits d'enregistrement en vue de permettre les règlements successoraux et les sorties d'indivision.

• L'article 28 de la loi n° 91-1323 du 30 décembre 1991 a prolongé ces dispositions jusqu'au 31 décembre 1992.

• L'article 50-111 de la loi n° 92-1476 du 31 décembre 1992 a prolongé ces dispositions jusqu'au 31 décembre 1993.

• L'article 33-111 de la loi n° 93-1353 l'a prolongé jusqu'au 31 décembre 1994.

• Le statut fiscal de la Corse étend le bénéfice de ces mesures jusqu'au 31décembre 1997.•> Elles ont été prorogées jusqu'au 31 décembre 2000.

• On peut constater, à la lecture de ces différentes loi de finances, que plusieurs Gouvernements ont reconnu l'incidence directe de la fiscalité sur les règlements successoraux.

L 'arrêté Miot

Le non-paiement des droits de succession sur les immeubles situés en Corse faisait intégralement partie du dispositif de remise en ordre Juridique du Territoire en matière immobilière dans le cadre des règlements successoraux.

La suppression pure et simple entraînera le blocage pur et simple de tout le mécanisme au moment même ou celui-ci faisait la preuve de sa réussite et de son efficacité.

Proposition de solutions nouvelles

l ) - Pour faciliter le règlement des successions et la remise en ordre du patrimoine immobilier des biens immeubles situés en Corse, les articles 750 bis A et l 135 du Code Général des Impôts, sont ainsi modifiés :

• Mesures d'allégement permettant la mise en ordre du patrimoine immobilier en Corse et règlements successoraux pour sortie d'indivision.
• Les actes suivants dressés entre le l janvier 2000 et le l er janvier 2005 sont exonérés de toute perception au profit du Trésor Public s'ils sont établis en vue de la création d'un titre de propriété, d'un règlement successoral et ou d'une sortie d'indivision.
• Procuration authentique ;
• Notoriété Dévolutive ;
• Notoriété acquisitive constatant la possession trentenaire (art.2229 du Code Civil) Création de titre de propriété ;
• Attestation immobilière ;
• Etat descriptif de division ;
• Partage et donation partage ;
• Licitation d'origine successorale.

Ces dispositions s'appliquent pour les biens immobiliers situés en Corse au bénéfice de toutes les personnes sans distinction de leur domicile ou de leur résidence

- Statut fiscal de la Corse

En matière de Transmission du Patrimoine Immobilier

Le texte proposé doit répondre à 3 impératifs :

• Etre utile et efficace ;
• Avoir le consensus populaire le plus large ;
• Avoir le consensus politique le plus large.
La mesure doit à la fois :
• Permettre aux Corses de conserver entre leurs mains le patrimoine qui est une des racines du peuple ;
• Avoir un effet sur le développement économique ;
• Ne pas être présentée comme une mesure d'injustice fiscale ;
• Avoir un effet dopant sur :

Le règlement du désordre juridique du Territoire en matière immobilière ;
Freiner l'exode rural et permettre de revitaliser l'intérieur ;
Permettre par une incitation " d'aide à la pierre " :

- la lutte contre le chômage ;
- la lutte contre l'exclusion ;
- faire travailler des entreprises de village qui embaucheront des personnes qui résident sur les lieux ou qui reviendraient habiter le village ;

Donc de faire :

- des inactifs, des personnes actives ;d'entreprises moribondes, des entreprises actives qui généreront de la TVA et avec des bénéfices l.S. ou de l'I.R.P.P.

Ce qui induit tout le reste, c'est-à-dire la remise en marche de la machine économique.

Principe : Pour les immeubles situés en Corse, le règlement des droits déroge aux dispositions de l'article 777 du Code Général des Impôts.

Une période de neutralisation

Afin de préparer la mise en place des nouvelles mesures, il est prévu une période de neutralisation de 5 ans pour les successions ouvertes entre le ler janvier 2000 et le 31 décembre 2005.

Pendant cette période, les biens immeubles situés en Corse ne supporteront aucun droit de succession.

Territorialisation de l'Impôt

Taxe au profit de la Collectivité Territoriale de Corse :

• La Collectivité Territoriale de Corse déterminera le seuil à partir duquel sera prélevée une taxe sur l'actif net des successions.

Elle en déterminera le taux.

• Son montant sera affecté à un organisme dépendant de la Collectivité Territoriale qui pourra acquérir ou recevoir en paiement et subventionner sous son contrôle des travaux de restauration et/ou de réhabilitation dans les communes rurales.

Propositions

• Un abattement général est appliqué sur la valeur de tous les biens immeubles situés en Corse.
• A partir de cas concrets et réels, la simulation de calcul des droits à payer conduit à préconiser un abattement de 600 000,00 francs.
• Un second abattement est également appliqué conformément à l'article 777 du C.G.I. (300 000,00 par parents et par enfants - 400 000,00 francs pour le conjoint.)
• La résidence principale est exonérée de tout droits si le legs est au profit du conjoint survivant (cette mesure se cumule avec les autres dispositions.)

Mesures concernant les donations

Afin de faciliter les transmissions par voie de donations entre vifs et pendant cinq ans :

• Les biens immeubles situés en Corse pourront être transmis par voie de donation entre vifs avec un abattement de 600 000 francs sur la part de chacun des ascendants et sur la part de chacun des enfants vivants ou représentés.
• Un abattement de 600 000 francs sera également applicable au droit du conjoint, entre frère et sœur et jusqu'au 4eme degré inclusivement.

Autres mesures à examiner

Transmission par décès de parts de SCI à prépondérance immobilière :

• Même régime fiscal que pour la transmission par décès des personnes physiques à condition que la mutation des parts soit constatée sur un certificat de mutation par décès authentique dans l'année suivant le décès et au plus tard au moment du dépôt de la déclaration de succession.

Evolution

Le montant des abattements fixé par l'Assemblée de Corse suivant la même variation que celle prévue au niveau National. Au-delà, le taux des droits sera fixé par la Collectivité Territoriales de Corse.

Condition pour bénéficier de ces mesures

l ) - La déclaration de succession devra être souscrite dans le délai de UN AN à compter du décès.

2) - La mutation des biens immeubles au fichier immobilier devra être réalisée dans les DEUX ANS du décès pour constater la transmission des biens du nom de la personne décédée au nom des héritiers ou ayants droit.

Le bénéfice de la mesure est attaché aux biens et non aux personnes (un continental et même un étranger pourra bénéficier du texte.)

Avantage particulier de la disposition

En imposant la mutation des biens immeubles du nom du défunt au nom des héritiers ou légataires, le fichier immobilier, tenu par les conservations des hypothèques, sera à jour, ce qui mettra enfin le cadastre en ordre, ce qui permettra à la perception des impôts que les percepteurs de Corse ne parvienne pas à recouvrer.

De même, les procédures amiables ou judiciaires pourront enfin être menées dans le respect des règles de droit.

Observation particulière

Pour faciliter l'adoption du texte fiscal, dans le débat parlementaire, il apparaît souhaitable que celui-ci soit associé à toutes les dispositions juridiques prises en faveur de la remise en ordre juridique en matière immobilière.

La mention de l'effort particulier accompli pour sortir d'une situation juridique anormale vers une situation normale et régulière ne pouvant souffrir aucune contestation.

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